Portrait de Stéphanie Scultore
Portrait

Stéphanie
Scultore

Essayer sans se juger, sans avis à priori, ni sur soi-même si sur les autres.

Campus Bruxelles
Année
professeur
  • Stéphanie, peux-tu nous parler de ton parcours artistique ?

Il est tout aussi académique qu’autodidacte. J’ai commencé le piano et la danse toute petite.  Le théâtre est arrivé à l’adolescence et s’est vraiment inscrit dans ma vie à 18 ans, après le secondaire, alors que j’étudiais aussi le chant jazz à Montpellier. J’ai commencé l’écriture à cette période.

Je suis ensuite partie à Paris trois ans, où j’ai étudié à l’école Les enfants terribles puis au Conservatoire du 8ème arrondissement avec Marc Ernotte. J’ai eu la chance aussi de participer à des stages intensifs, notamment un stage de clown d’un mois avec Philippe Hottier (théâtre du soleil), avec La compagnie Canadienne Ondinok sous la direction d’Yves Sioui Durant et Catherine Joncas, puis avec Ariane Mnouchkine, Tapa Sudana, Yoshi Oïda… C’était une période intense et des expériences très fortes parce qu’il y avait beaucoup d’exigence, d’éthique et de liberté.

Cette période est importante pour moi car j’ai découvert une façon de travailler très libre et respectueuse, une sorte de havre où l’on peut se permettre d’essayer des choses, laisser notre « personnalité quotidienne » de côté pour entrer véritablement dans le travail et la recherche. J’étais alors entourée d’acteurs déjà professionnels ou du moins avec plus d’expérience que moi, des âges, des corps tous différents, j’ai beaucoup appris grâce à eux !

Je suis rentrée à l’INSAS en mise en scène. J’ai beaucoup écrit et travaillé la direction d’acteur, le travail de l’espace… La musique a aussi repris sa route à ce moment-là : j’ai commencé à beaucoup m’intéresser au travail de la voix chantée et parlée. J’ai donc poursuivi le travail de chant et d’improvisation avec plusieurs musiciens de jazz et classique et suis partie en 2017 à Rio au Brésil étudier le chant brésilien et les percussions dans la samba. 

Aujourd’hui le travail de la voix et de composition et l’écriture sont ce qui m’anime le plus, dans le quartet ROSA où je chante, écris et compose, avec Matteo Carola, Mathieu Robert et Falk Schrauwen

  • Tu diriges l’atelier Voix au Cours Florent à Bruxelles, disponible via le PASS OPTION. Quels sont les objectifs proposés aux élèves en Formation ? Comment se déroulent les ateliers ? 

Chacun soit prendre contact avec sa voix, prendre le temps d’écouter et sentir « comment ça marche », « comment ça sort », apprendre à la connaître et à la découvrir dans différentes configurations de lieu, de textes, d’improvisations… On ne peut pas jouer d’un instrument si on ne le connaît pas, si on n’a pas passé du temps à l’écouter, le comprendre et l’appréhender dans le global et dans les détails. Cette partie prend du temps !

Cet atelier permet aussi de se déconnecter des scènes travaillées en cours d’arts dramatiques, et de travailler son instrument en profondeur, sans pression de réussite, en cherchant son propre vocabulaire. 

J’aimerais faire comprendre dans le même temps à quel point beaucoup de textes tracent des chemins non seulement de pensée, mais de corps, d’impulsions où les intentions s’inscrivent d’elles même. Il ne faut pas oublier qu’un texte d’acteur est un texte qui agit ! Nous travaillons sur des chansons, en chœur et en individuel, des textes (poèmes, théâtres, roman…)

On travaille à partir d’exercices sensori-moteurs, de la méthode Feldenkreiss : des petits mouvements en lien avec la respiration, des longues notes chantées ou des bouts de textes pour préciser les appuis, le rapport à l’espace, le souffle, l’adresse, l’articulation. Et c’est assez frappant ce que de si petites choses peuvent modifier ! 

Les attentes et axes de travail changent en fonction des années même si la matière reste semblable. 

En Première année nous travaillons beaucoup en groupe, sur le neutre, développé l’écoute, le rapport et l’adaptabilité de la voix à l’espace. En Deuxième année plus sur le chant et les lieux de résonnance de la voix, l’impulsion. Avec les élèves de Troisième année on a travaillé les empêchements, bégaiements, digressions par lesquels passent le langage, et qu’il faut affronter.

Un acteur lorsqu’il est sur scène recrée la vie. La voix est reliée au souffle, directement à nos émotions et notre état intérieur. Au téléphone lorsqu’on appelle quelqu’un on entend tout de suite à sa voix s’il est contrarié, fatigué, joyeux… C’est un des éléments qui nous percute directement.  Cela nous raconte beaucoup de chose sur ce qui est en train de se passer : si la voix n’est pas souple, reliée au corps, au souffle et à l’espace, l’acteur aura beau être investit des meilleures intentions il ne parviendra pas à toucher véritablement l’auditeur.  Et sur un plateau de théâtre il ne s’agit pas seulement de toucher son voisin, il faut aussi que la voix porte pour aller toucher ceux du fin fond de la salle !  

C’est tellement vivant la voix, et presque impudique, on ne peut pas se cacher ! On a vite peur de ce quelle pourrait révéler de nous et vite fait de la « travestir » pour garder le contrôle : la garder un peu basse pour avoir plus d’assurance, la garder fluette pour séduire … ou tout simplement la forcer et risquer de se faire mal ! 

C’est un peu paradoxal parce qu’on joue un personnage, mais plus on va se laisser voir et être perméable, plus c’est le personnage que l’on verra car il sera nourri et moins on verra nos limites d’homme ou de femme!  

  • Qu’attends-tu d’un élève qui participe à ton atelier ?

La présence et la curiosité pour rentrer dans la recherche. C’est principalement ça, lâcher ce que l’on sait, ce à quoi l’on tient, ce qui nous rassure, nous définit ou que sais-je pour entrer véritablement dans l’expérience, et le refaire à chaque fois ! C’est un travail infini qui s’affine, vit et s’enrichit tout au long de la vie. Aussi, il est très important que cet espace de travail soit libre, un lieu où chacun se permet d’essayer sans se juger, sans avis à priori ni sur soi-même si sur les autres

  • Quel conseil donnerais-tu à un élève souhaitant intégrer le Cursus de Formation du Cours Florent ? 

Je lui conseillerai de ne pas trop se poser de questions sur ce qu’on lui demande. Il doit observer ce que ça lui fait, ce que ça pose comme problème, ce que ça crée comme ouverture, comme questions, comme curiosité. Cette curiosité est un fil rouge !  

Je lui conseillerai aussi de ne pas trop s’occuper de ce que semblent réussir ou rater, ni de se fixer sur sa propre image, mais d’avancer, sincèrement, et avec bienveillance quoi qu’il lui arrive et quelques soient les obstacles qu’il rencontre sans se laisser impressionner ou décourager. 

Je crois que c’est un métier où il est très important de trouver une justesse sans être complaisant et vraiment chercher ce qui nous touche et fait que c’est nous. Chercher le jeu en toute circonstances même les pires !  

Partager cet article